Un Forum Social Mondial dans la dynamique des processus révolutionnaires
La CGT Educ'action 06 avait une délégation de 3 personnes au Forum Social Mondial qui s'est déroulé à Tunis des 26 au 30 mars deux ans après le début de la révolution citoyenne tunisienne. Cette édition 2013 du rendez-vous altermondialiste est incontestablement un succès du point de vue de la participation, de l'organisation,des contenus et des défis qui étaient à relever. Ce FSM, espace de rencontres et de débats, a réussi la jonction entre des mouvements sociaux et citoyens, la population tunisienne et le processus révolutionnaire en cours en Tunisie et dans le monde arabe.
L'accueil réservé aux 70 000 participant-e-s a été particulièrement chaleureux, sur les lieux de débats et dans la ville même. Beaucoup, notamment les plus jeunes, exprimaient leurs remerciements aux altermondialistes pour leur présence solidaire à Tunis et montraient une soif d'échanges, de questionnements et une liberté de parole qui n'aurait pas été envisageable sous la dictature de Ben Ali.
Plus de 1 000 ateliers étaient proposés sur l'immense campus de l'université El Manar aux 70 000 participant-e-s issu-e-s de 5 000 organisations et associations venu-e-s de 128 pays. Difficile de choisir à quelle initiative participer !
Les débats, menés sous différentes formes et dans une atmosphère bienveillante et chaleureuse, étaient de bonne tenue en général. Ils portaient sur des thématiques très variées : processus révolutionnaires , dette et austérité, institutions internationales, luttes contre toutes les oppressions ou inégalités , écologie, économie, démocratie, paix, droits des peuples, construction d'alternatives...
Nous avons choisi de suivre plus particulièrement les initiatives concernant l'éducation* , bien sûr, les services publics*, les politiques d'austérité imposées aux peuples mais aussi les droits des femmes. En ouverture du Forum s'est tenue l'assemblée des femmes sous le thème "femmes en lutte". Sur le campus du FSM, elles étaient très nombreuses et plusieurs ateliers traitaient des questions féministes d'une acuité particulière dans cette Tunisie où leurs droits pourraient remis en cause.
Autour du Forum
étaient organisées de multiples initiatives dans
l'enceinte du campus et dans les rues du centre ville, des concerts,
des pièces de théâtre, des rencontres
informelles , des mini-manifestations mais aussi des moments
très émouvants comme le meeting-concert en
hommage au dirigeant du Front populaire tunisien assassiné :
Chokri Belaïd .
Le Forum Social
de Tunis s'est achevé par l'Assemblée des
mouvements sociaux (voir déclaration ci-dessous) et une
manifestation de soutien avec le peuple palestinien qui a
rassemblé plusieurs milliers de personnes . L'accueil
enthousiaste réservé aux drapeaux de la CGT
Educ'action nous a rappelé indirectement le rôle
clé joué par le syndicalisme dans la
révolution tunisienne surtout par l'UGTT (Union
Générale des Tavailleurs de Tunisie) dont Chokri
Belaid était d'ailleurs l'avocat.
Intitulé « Forum de la DIGNITE », le FSM de Tunis a confirmé que les forum sociaux comme espace de rencontres entre les luttes les plus diverses sont des lieux uniques et irremplaçables et le succès de cette 12ème édition restera celui de la convergence avec un processus révolutionnaire porteur d'espoir au nord comme au sud de la Méditerranée.
Ce débat ne pouvait que nous intéresser, tout particulièrement après les riches débats de notre congrès. L'introduction de l'atelier a cherché à montrer les enjeux d'une réflexion reliant la transformation de l'école à un projet d'émancipation.
Pour les intervenants (un français* et un espagnol), cette conception de la transformation de l'école rend nécessaire deux choses : défendre le service public d'éducation contre les attaques du capitalisme qui cherche à l'affaiblir et à y faire rentrer la logique de la concurrence et du marché mais aussi être force de proposition pour transformer l'école dans une perspective émancipatrice et autogestionnaire.
Cette transformation doit porter autant sur les contenus et les méthodes que sur les structures du système éducatif.
Les orateurs ont notamment insisté sur l'importance de développer le travail en équipe pour les élèves comme pour les enseignant-e-s, de repenser l'évaluation, de donner de véritables droits aux jeunes et de refuser la dégradation du statut d'enseignant tout en redonnant le pouvoir aux équipes pédagogiques en alternative au fonctionnement hiérarchique actuel.
Le débat qui a suivi a vu la participation d'enseignant-e-s, de syndicalistes et de militant-e-s politiques de Tunisie, bien évidemment, mais aussi d'Egypte, du Québec, de France et d'Espagne. Chacun-e a pu témoigner des luttes en cours pour défendre le système public d'éducation contre l'austérité (luttes contre les coupes budgétaires en Tunisie ou « printemps érable » au Québec) tout en insistant sur l'importance de sortir l'éducation de la logique capitaliste.
Nous sommes intervenus dans ce débat au nom de la CGT Educ'action pour dire que, dans la perspective d'une école émancipatrice, les luttes pour une réelle égalité filles/garçons dans l'éducation sont d'une importance fondamentale.
L'atelier sur les discriminations des filles et des femmes dans l'éducation a forcément attiré notre attention. Nous connaissions déjà bien les constats faits par l'intervenant de Solidaires : les filles ont de meilleurs résultats que les garçons mais cela ne se reflète pas dans le procédures d'orientation. Ensuite il n'y a pas d'égalité dans l'accès aux métiers et dans les déroulements de carrière. Le rôle de la persistance des stéréotypes dans la société, à l'école et jusque dans les manuels scolaires est déterminant. L'analyse a ensuite été élargie à différentes régions du monde. Au Niger, les freins à la scolarisation des filles sont très importants (religion, mariage précoce, pauvreté...).
En Tunisie, la
représentante de l'UGTT a rappelé la
scolarisation massive des filles depuis l'indépendance et a
mis en avant la nécessaire vigilance pour que le processus
révolutionnaire prenne en compte
l'égalité filles-garçons.